Cette conférence-débat a été organisée dans le cadre du passage de l’exposition itinérante « Mais où sont passées nos garrigues ? » sur le territoire de la Communauté de Communes Séranne Pic Saint-Loup. Cette exposition réalisée et animée par l’association des Ecologistes de l’Euzière a pour objectif de découvrir et re-découvrir nos paysages de garrigues languedociennes et leurs patrimoines mais aussi d’échanger et discuter sur l’avenir de ce territoire.
Présentation initiale :
Dans les départements du Gard et de l’Hérault, entre les plaines littorales au sud et les contreforts des Cévennes au nord, s’étend un vaste paysage typiquement méditerranéen de collines et plateaux. Ce territoire des garrigues recèle un riche patrimoine naturel et humain hérité d’une longue histoire de relations complexes entre l’homme et son environnement. En effet, pendant plusieurs millénaires les activités de l’homme comme l’élevage du mouton ou l’utilisation systématique du bois de chêne vert, ont fortement marqué le paysage de ces collines calcaires de l’arrière-pays méditerranéen, donnant naissance à un milieu très particulier que l’on appelle la garrigue. Mais au 20e siècle et notamment depuis les années 50, les usages traditionnels de la garrigue ont quasiment disparu. Par exemple, l’élevage ovin, élément central du fonctionnement agricole en garrigue, s’est complètement écroulé en un siècle (près de 500 000 moutons dans le Gard en 1840, moins de 45 000 en 2006). Par conséquences, le paysage s’est rapidement transformé. Là où autrefois s’étendaient de vastes surfaces de garrigues basses, des pinèdes et des taillis de chênes verts prennent la place. Ces zones sont aujourd’hui surtout utilisées pour des usages de loisirs. L’agriculture aura-t-elle une place dans l’avenir des garrigues ?
Compte-rendu du débat :
La discussion démarre par un listing des différentes productions agricoles des garrigues de Saint-Martin et des alentours.
- Différents types de production en garrigue autour de Saint Martin
- La vigne. il y a deux façons de faire différentes : les AOC (Pic Saint-Loup, Terrasses de l’Aubrac) et la vigne du bassin de Saint-Martin, des caves coopératives. Si cette production de vin de consommation courante est en fort déclin, les vignobles AOC se maintiennent assez bien.
- Le maraîchage : agro-biologique, AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne), de l’oignon à Saint-André-de-Buèges et il s’est fait de l’asperge il y a une quinzaine d’années. Le problème du maraîchage, c’est qu’il faut de l’eau.
- L’élevage. L’élevage hors-sol : poules, chèvres ; ou extensif : chèvres, moutons (viande ou lait), bovins (taureaux de Camargue ou Aubrac), chevaux. Quelques cultures en liens : céréales et prairies de fauche pour l’alimentation des bêtes.
- Le miel
- La pisciculture sur Pégairolles (proximité rivière)
- La trufficulture
- Les oliviers : dans la Buèges essentiellement, le bassin de Londres ne présentant pas de conditions très favorables à son exploitation.
- Le croqus pour faire du Safran à Saint jean de Buèges.
- L’exploitation forestière
- Les difficultés de l’agriculture dans les garrigues autour de Saint Martin
- Les contraintes du milieu : sol peu profond, manque d’eau, conditions micro-climatiques du bassin de Londres assez difficiles
- Les contraintes humaines :
- le foncier : il existe une concurrence avec le constructible notamment sur les sols les plus rentables.
- les reprises d’exploitation : le potentiel de repreneurs est faible et ceux qui veulent ne trouvent pas de terrains ou de bâtiments. Il a des difficultés de mise à disposition du foncier : le bail rural est perçu comme enfermant. Il faudrait réfléchir à d’autres solutions alternatives au bail rural.
- la concurrence avec les locations de chasse privées
- La rentabilité : les difficultés sont dues au contexte de concurrence économique, il est difficile de vivre de son activité notamment dans l’élevage.
- Les contraintes sanitaires : éloignement des abattoirs, laboratoire pour les fromages, vaccination...
- Les contraintes de transport : par exemple les veaux sont engraissés en Italie, les agneaux en espagne...
- L’élevage est tributaire de la productivité en herbe. Il faut des races adaptées (Aubrac, Ariégeoise, Caussenarde des garrigues, Blanche de Lozère). Tous les éleveurs sont obligés d’acheter du foin car il n’y a pas assez de bonnes terres pour faire de la prairie de fauche, il n’y a pas assez d’eau.
- Des solutions pour l’agriculture dans les garrigues autour de Saint Martin
- La crainte du feu amène à réfléchir au débroussaillage et à la réimplantation de l’élevage. Le canton de Saint Martin fait partie de ceux où il reste le plus de troupeaux. Or on remarque qu’il y a très peu d’incendies, et les feux ne dépassent jamais les 5 ha.
- par rapport au manque d’eau, des réflexions existent sur l’implantation de retenues collinaires. Le raccordement à l’eau du Bas-Rhône est également discuté. Mais certains craignent l’arrivée d’une eau du Rhône très polluée.
- face à la problématique du foncier, il existe des solutions d’installations de troupeaux sur des terrains départementaux ou des parcours sur le terrain militaire de Viols. La MSA et la DDA organisent également des campagnes d’informations auprès des propriétaires sur la transmission des exploitations.
- des expérimentations sont en cours notamment sur la technique du BRF (Bois Raméal Fragmenté). Cela consiste à utiliser les ramasses, les copeaux de bois local frais et broyé, pour améliorer les sols. Des tests se font sur Mortiès et à Lamalou.
- les dynamiques de mise en place de produits de qualité comme avec les AOC amènent parfois à des excès au niveau des prix.
- la discussion explore plus en détail la solution des circuits courts. La hausse du prix des transports peut favoriser une agriculture et un élevage local notamment en utilisant le bassin de consommation de Montpellier. Il y a un besoin important d’organiser des filières d’écoulement des produits de garrigues. Il ne faut pas d’intermédiaires ou alors des intermédiaires publics. Cà peut être le rôle des collectivités de mettre en place des plateformes pour que les producteurs puissent vendre à proximité. Il faut favoriser les coopératives de producteurs, les marchés, les caveaux mais aussi la mise en place de solutions nouvelles comme les abattoirs ambulants...
La discussion se termine sur le constat que les garrigues de Saint-Martin-de-Londres ont encore une agriculture et un élevage assez vivants bien qu’en fort déclin. A ce titre, ce territoire peut être moteur dans une organisation agricole nouvelle (filières courtes, remise en place de troupeaux...) du pays des garrigues languedociennes.