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samedi 29 avril 2006, par
Ce jeudi 5 janvier 2006, 2 travaux universitaires sont présentés :
Malgré le mauvais temps, plus de quarante personnes se sont déplacées à la Maison de la Charte de St-Mathieu-de-Tréviers, où la Communauté de communes du Pic St-Loup avait mis une salle à notre disposition, et nous les en remercions vivement.
Parmi les personnes présentes : Monsieur Alain Poulet, Président de la Communauté de communes du Pic St-Loup, Monsieur David Tournier, Directeur de la Communauté de communes PSL, des représentants de l’INRA/ENSA, du CNRS, des viticulteurs de la région du PSL, des responsables d’associations locales…
La soirée a commencé par un bref exposé du contexte de réalisation des études présentées ce soir. Dans le cadre des différents projets que l’association des Ecologistes de l’Euzière va conduire en 2006 et 2007 dont le fil conducteur est « les garrigues et leur avenir », deux études ont été proposées sur la perception de la garrigue par les personnes vivant dans ces territoires, et les acteurs locaux et leur articulation. Il s’agissait également de restituer les résultats à l’ensemble des personnes qui se sont volontiers soumis aux questions des étudiants. Qu’ils en soient remerciés ici.
Alain Poulet exprime le plaisir de pouvoir accueillir une restitution de travaux de haut niveau dans les locaux de la Communauté de communes concernée au premier chef par les résultats puisqu’ils ont été essentiellement conduits sur ce territoire.
1 - « Quelles représentations a-t-on de la garrigue ?
Des paradoxes aux enjeux »
Par Sébastienne CLAVEL
Sur le territoire concerné (le Pic St-Loup et ses environs), une trentaine de personnes ont été interviewées selon un protocole assez précis, mais laissant également une large place à la libre expression.
La présente restitution portera plus sur les paradoxes qui ont été relevés au cours de l’étude.
Perception de la garrigue
Le Pic St-Loup est bien évidemment un point important et prépondérant, avec l’Hortus, mais également les aspects minéraux et arides qui apparaissent bien avant la garrigue. Il y a un décalage de perception car actuellement le paysage est beaucoup moins minéral qu’il ne l’a été. Les gens avaient peut-être une perception ancienne, et ils l’ont gardée malgré l’évolution constatée des paysages.
Les notions « prés – loin » : très rapidement, apparaît le pouvoir évocateur du lieu, les notions de liberté, de détente, de sérénité… mais dans le même temps, la garrigue est rapidement qualifiée de piquante, pauvre, monotone. Comme s’il s’agissait d’un paysage idéalisé dans la perception lointaine et piquant dans la perception proche.
L’aridité apparaît peu en elle-même, mais la notion de deux « printemps » chaque année est présente.
En ce qui concerne les connaissances sur le milieu, la flore est assez présente, mais si le thym, le romarin et le chêne vert sont les grands représentants (côté Herbe de Provence), les pins, qui sont pourtant très présents maintenant, ne sont pas souvent cités ; les gens ne voient pas vraiment le milieu tel qu’il ait. Les fleurs sont rarement évoquées : la perception est très estivale.
Faune et flore
La faune est très méconnue, le sanglier est très largement le plus cité, quelques autres mammifères et gibiers en général, pas d’insectes à l’exception de la cigale ; là encore, de près, on voit peu les insectes.
La place particulière de la vigne
Ces perceptions « de prés – de loin » amène à une exclusion totale de la vigne : elle n’est jamais cité dans les enquêtes, elle n’est pas remarqué dans les paysages, seuls les vignerons en ont parlé ! Cependant quand on en parle, elle entraîne beaucoup de discussions : sur les impacts avec une image très négative liée aux traitements (pollution) et une image incomprise sur les défriches qui apparaissent comme nuisibles à la qualité paysagère du territoire. Au contraire, le travail des vignerons est très valorisé : métier noble, des efforts de qualité, et aussi les qualités paysagères de la vigne (couleurs au fil des saisons, rythme dans le paysage…). Elle est également perçue comme un rempart au feu et à la construction.
Il y manque donc nettement un lien entre la volonté de qualité et l’identification négative de certains aspects de la vigne (cas des défriches).
Potentialités et menaces
Dès que les gens se projettent dans l’avenir, ils ressentent plus fortement les risques et les menaces que d’éventuelles solutions.
Le risque le plus fréquemment évoqué est celui de destruction par l’urbanisation, mais l’envahissement par la forêt n’est jamais évoquée, alors qu’il menace tout autant la garrigue.
Pour les solutions et opportunités, là encore, beaucoup de contradictions : par exemple, il ne faut rien toucher mais on n’imagine pas que ça évoluera naturellement. Les usagers du territoire (viticulteurs, apiculteurs) évoquent les coupes de bois, les défriches, la possibilité d’utiliser le feu comme outil pour maintenir les milieux ouverts. Les habitants qui n’ont pas un usage professionnel du territoire sont plus sensibles à la protection du « poumon vert ».
Typologie sommaire des habitants de la garrigue
Quelques pistes d’actions et de réflexions : Révéler la garrigue : il faut apprendre à la voir de près en favorisant toutes les actions qui permettent d’y entrer à fond,(sentier, animations…)
Il ressort des débats que la garrigue est souvent perçue « en creux », comme un territoire sans projets. La question des définitions s’est posée, et là, on s’aperçoit que chacun à sa définition : le berger, le citadin, le viticulteur… La limite avec la forêt est également assez floue. Un point de vue assez partagé : pour découvrir et apprécier la garrigue, il faut faire l’effort de s’y immerger. Les représentations sont aussi le reflet de l’éloignement entre le milieu naturel et les personnes, de plus en plus nombreuses, qui ne le fréquentent pas
2 - « Quel avenir pour les garrigues du Pic St-Loup ?
Eléments de réflexion »
Par Manuel IBANEZ
L’objectif était d’amorcer une réflexion prospective sur le devenir territorial des garrigues du Nord de Montpellier.
Les garrigues peuvent être définies par leur végétation : typiquement méditerranéenne, arbustes bas, épineux, adaptés à la sécheresse, végétation rase dûe au pâturage et aux incendies.
Mais c’est aussi un territoire entre les plaines du Sud et les Cévennes, entre la vallée de l’Hérault et celle du Rhône, un territoire de vallons, collines, plateaux calcaires… Il est caractérisé par une occupation humaine ancienne, un patrimoine bâti riche, une longue tradition d’élevage ovin…
Sur le territoire du Pic St-Loup : trois Communautés de communes (Pic St-Loup, Séranne et Pic St-Loup et Orthus). Des mutations sur cet espace :
Perception des acteurs locaux
Face à ces évolutions rapides, une volonté de construire un territoire plus cohérent et fonctionnel s’exprime à travers :
Quelles conditions pour créer un véritable territoire ?
Deux scénarios extrêmes se dessinent :
Les débats ont été très denses, notamment sur l’urgence de l’action devant la régression importante des garrigues (ex. du miel de thym qui ne peut plus être produit dans la région par manque de territoire assez homogène). L’absence du pâturage ovin est certainement une cause très importante de disparition des garrigues.
Il existe des groupes, notamment de professionnels, qui ont une même vision du territoire et qui coopèrent entre eux, mais pas forcément de façon structurée, plutôt opportuniste. L’exemple des viticulteurs est signalé : travail avec les acteurs du tourisme (Vignes buissonnières), formation sur les milieux naturels, réseaux coopératifs… Les chercheurs, les services du Conseil général constituent également des groupes d’acteurs, mais ils ont peu de contact avec les professionnels.
La place de la vigne est également très discutée : fait-elle partie de la garrigue ? Peut-être en tant que dégageant des espaces, mais pas du point de vue botanique par exemple ! Un travail plus fin sur cette ambiguïté serait à conduire.
Par rapport à la place de l’agglomération montpelliéraine, il ne faut pas opposer les visions ; le territoire est complètement lié à Montpellier et à sa dynamique et pas seulement par l’extension de la ville (travail, centre culturel…). Pour les citadins, la garrigue est importante comme territoire de contact avec la nature et certains en font un usage plus intéressant que ceux qui y vivent.
L’opportunité d’un Parc Naturel Régional est également très discuté : est-ce que ce type de structure a les capacités de répondre à l’urgence de la situation ? Cela n’est pas sûr, mais dans tous les cas, la nécessité d’une construction partant du débat citoyen (conseil de développement) semble indispensable.