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dimanche 12 janvier 2003, par ,
L’histoire du maçon là-haut sur le Pic-Saint-Loup
Peut-être avez-vous vaguement entendu parler de la chapelle qui se trouve au sommet du Pic Saint Loup ? On y accède par un petit sentier escarpé encombré de rochers et de ronces. Il y a un an à peine, c’était un ruine au bord d’un précipice. Quand bien même la mairie de Cazevieille aurait disposé des sommes nécessaires pour la rénover, qui aurait accepté d’aller travailler là-haut ?
Jusqu’à ce jour de novembre 1995 où la mairie reçoit la lettre d’un jeune maçon demandant l’autorisation de rénover bénévolement la chapelle...
10 juillet 97. Après quelques jours de recherches, j’ai retrouvé sa trace : il s’appelle David Sémerian et effectue actuellement un stage de tailleur de pierre. Je m’attends un peu à rencontrer un illuminé, mais c’est un beau mec de 28 ans qui vient à moi, direct et souriant.
Nous arrivons en cahotant dans sa vieille 4L-camionette au pied du Pic Saint Loup. Il me montre une croix minuscule au sommet de la falaise (fut un temps où la chapelle était le but d’un chemin de croix) : "c’est là-haut".
La rénovation a duré de novembre 95 à juin 96. Non seulement la chapelle n’est accessible qu’à pied et le chemin
difficile, mais il n’y a aucun point d’eau. "Le système de recueillement des eaux de la chapelle était inutilisable, la citerne obstruée par les détritus des promeneurs inconséquents. C’est un vieil homme extraordinaire, Monsieur Marcel Maillard, récemment décédé, qui a insisté pour la remettre lui même en état".
C’est que l’enthousisame de David s’est révélé contagieux. Afin de récolter un maximum d’eau et pour la confection du ciment, il avait laissé un écriteau demandant aux randonneurs de laisser leurs restes d’eau à la chapelle avant de redescendre.
Appel entendu : on lui a monté des tonnes de vivres, prêté des outils, offert des matériaux... La rénovation avait en effet commencé avec très peu de moyens : Je faisais un CAP à Nîmes pendant la semaine. Le vendredi soir, je jouais de la guitare dans les rues pour me payer le train jusqu’à Montpellier et le bus jusqu’à Cazevieille, et je passais tout le week-end là-haut.
Nous entreprenons donc l’ascencion du Pic Saint Loup. Mon guide connaît le chemin par coeur, chaque arbre, chaque rocher. "Lorsque je devais faire l’aller-retour plusieurs fois par jour pour transporter des matériaux je m’amusais à imaginer des choses dans les pierres".
Il me montre aussi des traces de sanglier. Je l’interroge sur tous ces week-end passés ici. "Oui j’ai connu des jours de neige...". Les Montpelliérains se souviennent sans doute de cet hiver 96 particulièrement pluvieux... On peut imaginer la solitude et le froid d’un campement de fortune au sommet du Pic Saint Loup.
Mais David aime la nature et les défis. Avant de rénover la chapelle du Pic Saint Loup, il était parti construire un terrain de basket pour les enfants de la rue à Calcutta, en Inde...
Après une bonne heure d’ascension, il me fait remarquer que nous presque arrivés : "Quand l’air est plus frais, quand on respire mieux, on sait qu’on arrive au sommet".
C’est vrai qu’il a souvent fait le trajet de nuit. En arrivant, un panneau prie les promeneurs de respecter cette rénovation récente et bénévole.
Le nom du rénovateur ne figure nulle part. David Sérémian est quelqu’un de discret. C’est tout juste s’il accepte que je le photographie devant la chapelle. A travers ce genre de projet, il veut néanmoins faire passer un message : "Il y a des choses à faire. Quitter la morosité n’est pas une solution politique mais un engagement personnel. Un projet comme celui-ci peut aider les gens à retrouver leurs aspirations profondes et être le catalyseur d’autres projets".
Résultat : aujourd’hui la chapelle est un véritable joyau d’architecture, avec ses pierres apparentes et son jardin d’iris en pleine altitude.
Constance Dedieu-Grasset.
Source : La Gazette de Montpellier. n°487-488. Août 97
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